Une femme revoit sa vie comme une traversée de déserts: ceux du monde où elle a tant marché, celui de sa solitude incurable, et puis cet hôpital où elle travaille auprès d’enfants qui guérissent ou bien meurent. Elle aussi, dans son enfance, fut malade et crut qu’elle allait mourir. D’ailleurs sa propre mère est morte en lui donnant la vie. De quoi se sentir à jamais coupable de vivre – et de survivre encore, à soixante ans, à ces enfants.
Mais un jour arrive à l’hôpital une jeune fille venue des oasis, et puis une autre, touarègue, venant du désert des déserts. Et entre elles remontent ces chants du désert où la beauté s’élève du rien, et où la mort s’entrelace à la vie.
Extrait :
Elle sanglotait comme un enfant, un nouveau né, que sa mère aurait abandonné. On aurait dit qu’elle était en train de naître, dans cette bulle, où peut-être elle allait finir, comme si soudain elle se dépêchait de naître, complètement, avant de partir, peut-être pour retrouver sa mère. Et moi, une étrangère, j’étais la seule à voir ça, même son père avait préféré sortir. J’étais la seule à l’avoir suivie dans ce désert-là. Même quand les proches sont là c’est souvent comme ça, il y a des choses, sans doute insupportables, qu’ils ne veulent pas voir. Comme s’il était un seuil au-delà duquel un étranger nous devient plus proche que nos proches. Et comme si là était un autre amour, au-delà de ce qui nous appartient, de la jalousie, de la douleur, un amour qui ne fait plus souffrir, un lien mais qui libère, un amour de nomade, qui s’éloigne, tout en restant fidèle.